Le projet européen Green Deal qui comprend différentes lois et réglementations, doit permettre à l'Europe d'atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. Lors du sommet changeNOW à Paris, le bureau d’audit KMPG™ présentait les priorités pour un changement systémique des affaires: Biodiversité, Transition Énergétique, Adaptation aux changements climatiques, Inégalité sociale, Protection des ressources en eau. Elles rentrent toutes dans la série de réglementation européenne en cours.
Toutes les démarches d’écoconception, de sourcing durable et de traçabilité nourrissent cette démarche bientôt obligatoire en Europe. Dans un contexte où la France dévoile officiellement la méthode retenue pour le calcul de l’impact environnemental issus de la méthode PEF, quels sont à date, les points sur lesquels se pencher ? Comment mettre en place les bonnes actions ?
A la différence de l'industrie du prêt-à-porter, les marques de sport doivent satisfaire deux segments de clients distincts. Les athlètes de haut niveau qui requièrent des équipements performants pour exceller dans leur pratique et respecter l’environnement, puis les besoins du grand public pour maintenir leur marché. Cela demande une stratégie sur mesure amont et aval et les impliquent fortement dans la production à l’ère du pacte vert Européen.
En mars, en France, tous les députés ont approuvé une proposition de loi visant à "diminuer l'empreinte écologique de l'industrie textile", pour ralentir la progression de la mode rapide et à très bas prix. Le 3 avril le gouvernement Français a publié l'adoption de la méthodologie pour l'affichage environnemental des produits textiles, à déployer d'ici 2025. Cette méthodologie est en phase de consultation avec les marques et un décret d'application est prévu. Ces instruments réglementaires cherchent à accroître la transparence de l'industrie du textile. Dès l'automne 2024, les premières marques volontaires pourront afficher leurs résultats, comme le fait déjà Lagoped ™.
La proposition de nouveau règlement sur l'écoconception des produits durables, le Ecodesign for Sustainable Products Regulation (règlement sur l'écoconception des produits durables) (ESPR), publiée en mars 2022, vise à améliorer significativement la circularité, les performances énergétiques et la durabilité environnementale des produits dans leur conception. Elle comprend des exigences sur la performance énergétique et environnementale. Ainsi que des normes pour l'étiquetage des produits afin d'informer le consommateur. Elle concerne presque toutes les catégories de biens physiques mis sur le marché de l'UE. Les Informations doivent être partagées de façon “ fiable et facilement compréhensible” sur QR code et un passeport numérique. Au cœur des bases de l'éco conception et des paramètres de l’affichage environnemental, l’outil analyse du cycle de vie accompagne ces mesures.
D’après Quantis™ et la spécialiste de l’empreinte environnementale Emilie Carasso qui participe aux discussions techniques avec la commission européenne: “Les producteurs d’outils ACV partagent généralement leurs méthodologies publiquement par souci de transparence. Il est tout à fait possible pour les entreprises de demander si l’outil est aligné avec les PEFCR, ou quelles sont les déviations le cas échéant. Il est important de noter que les méthodologies locales d’affichage environnemental des textiles, par exemple en France, peuvent pour l’instant différer des PEFCR. Cette situation pourrait néanmoins évoluer lorsque l’acte délégué d’ESPR pour les textiles sera publié.“
Au niveau européen, le Product Environmental Footprint Category Rules (PEFCR) désigne des règles spécifiques pour évaluer l'empreinte environnementale d'un produit ou d'une catégorie de produits tout au long de son cycle de vie. A date, le PEFCR n’est pas une méthode mais une proposition définie par la Commission Européenne qui fournit des lignes directrices détaillées sur la collecte de données, les méthodes d'évaluation des impacts environnementaux et la communication des résultats. Le PEFCR pour l'habillement et la chaussure est actuellement en phase de développement, avec la version 2.0 rendue publique en mars 2024. La méthode finale européenne à une projection de validation définitive mi 2025.
- Centré sur les produits : le PEFCR actuel ne prend pas en considération la quantité de produits commercialisés par les marques. Il ne tient pas compte de l'empreinte environnementale de l'entreprise, y compris le volume de collections produites.
- Le cycle de vie : l'impact des produits sur l'ensemble de leur cycle de vie, jusqu'à leur fin d'utilisation est concerné. Avec une concentration sur la durée d'utilisation du produit, la robustesse fera loi en première et seconde main.
- Seconde main : à date, une étiquette différenciée a été proposée mais cette distinction n'est pas réalisable. Le PEFCR sera ajusté en conséquence.
- Une comparaison transparente : cette initiative permet une comparaison de l'empreinte environnementale entre différents produits similaires.
- Seize catégories d'impact, dont huit familles qui ont un impact direct sur la biodiversité : changement climatique, l'eutrophisation aquatique des eaux douces, l'eutrophisation aquatique marine, l'eutrophisation terrestre, l'acidification, l'utilisation de l'eau, l'utilisation des terres et l'écotoxicité des eaux douces
- Biodiversité : Il n’existe actuellement pas de consensus international sur une méthode d’évaluation de l'impact sur la biodiversité. Des recherches supplémentaires doivent être menées.
- Labels, normes et certifications : Cela dépend de la granularité des données du produit et de la certification. Le coton biologique est disponible sous forme générique avec un ensemble de données spécifiques à de nombreux pays (Inde, États-Unis). Cela ne donnera pas de points bonus à moins qu'ils ne soient quantifiables et évalués sur la base de référence EF.
- Les microplastiques et les microfibres : Ceux à impact marin seront partagés séparément sur la base de données du Microfibre Consortium. Les données antérieures de microfibre ne peuvent-elles pas être incluses dans le PEF pour le moment. A date, les données microfibres liées aux conditions d’usage du vêtement par le grand public sont exclues car trop aléatoires.
- Fin de vie : le nombre d'utilisation pour chaque catégorie tient compte de l'usage final (sport, mode, enfant, workwear…) et de la composition du textile (naturel, synthétique…) A noter que dans la même catégorie, le nombre d'utilisations attendu peut être très différent pour chaque application.
- Exclusion volontaire : des catégories de produits de niche ou des vêtements trop techniques comme les uniformes de workwear.
- La seule base de données officielles est celle du guide of EF compliance data : pour être validé, 90 % de l'impact du produit doit être calculé sur cette base.
- Calcul données : Certaines données sont calculées au niveau de l'entreprise (production externalisée) et d'autres au niveau du produit.
- Transparence : Le mot d'ordre pour permettre la reproductibilité, la cohérence et la pertinence.
Élargissement de la portée : Préparer la répercussion sur les enjeux métiers avec les marques et les fabricants puis les vendeurs et les clients. Le grand public est sensibilisé avec l’affichage environnemental et les passeports produits basés sur un système de micro points. Ils sont calculés à l'aide d'un outil open source intégrant la Base Empreinte et des indicateurs PEF européens : Écobalyse.
Retrouvez les caractéristiques à date de l’affichage en France
PEF impact database :
- POC Les consultations publiques servent le proof of concept. La deuxième sur le PEFCR est en ligne jusqu'au dimanche 28 avril 2024.
- BOM: Il existe une marge de 5 % sur un rétro calcul pour la nomenclature composante de la (bill of materials), basé sur la gamme de taille.
- DOS: Duration of service, un mélange entre durabilité physique et coût d’usage. L'écoconception, les conditions de durabilité extrinsèque et la réparabilité sont clées.
Renforcement des exigences de qualité de durabilité : avec des rapports plus détaillés (Gestion ressources et déchets, traçabilité, bien vivre des travailleurs, tiers parties fiables) et en établissant des normes communes pour garantir la comparabilité des données. Pour Emilie Carasso : Une bonne durabilité physique (pas de déformation, de perte de performance, etc.) combinée avec une vraie réparabilité permettent ainsi de prolonger la durée de vie des produits de façon significative.
Gouvernance et stratégie d'entreprise : Revoir la hiérarchie et les programmes de formation. De l’ingénierie des analystes scientifiques des données à la capacité d’agilité des achats et de la gestion logistique.
Comprendre les ponts avec la CSRD et le devoir de vigilance : Imbriqués à l’affichage environnemental, ils deviennent une valeur ajoutée pour financer le sourcing dans le futur. Le Secrétariat Technique élabore les règles et la Commission européenne, la décision finale en adoptant les règles.
Préparation et planification : Selon Emilie Carasso, PEFCR Apparel & Footwear contiennent une mine d’informations et d’outils méthodologiques pour guider les entreprises dans cette direction. L’impact des invendus est également un point à ne pas négliger. Affiner les projections de ventes afin d’adapter les volumes de production est crucial pour réduire l’impact de l’industrie.
Principaux indicateurs PEFCR : La réduction de l'utilisation de substances toxiques dans la production, de l’empreinte C02, ainsi que la gestion efficace des déchets textiles sont prioritaires. On commence souvent par la réduction de son empreinte carbone sur la chaîne d'approvisionnement, y compris la production de fibres, le transport et la distribution de ses produits finis. Puis viennent la biodiversité et la santé, ainsi que la protection des droits des travailleurs dans les pays de production car ces mesures ont beaucoup d’impact extra territorial.
- CO2 & GES : L’indicateur le plus observé est les émissions de gaz à effet de serre par kilogramme. Il est important de travailler des objectifs par paliers atteignables comme Goretex™ l’a établi avec Quantis. A la différence de la Science based target initiative (SBTI), qui vient d’inclure les crédits carbone comme réduction de carbone scope 3, à date, le PEFCR ne considère pas la séquestration carbone comme levier de réduction d'impact.
- Focus eau & produits chimiques : L'importance de la gestion de l'eau pour les entreprises, souligne les risques liés à la disponibilité et à la qualité de l'eau, ainsi que les opportunités de gestion durable de cette ressource vitale. De l’eau dans les usines de teinture ou de finition, l’eau pour les cultures, l’apport d’énergie sont la deuxième source de focus.
- Circularité mon allier : Toutes les informations sur le cycle de vie, la réparabilité et les ressources post consommateur sont des éléments qui diminuent fortement le système de points d'impacts (négatifs) attribués. Le sourcing circulaire en particulier fibre à fibre, eau recyclée et les taux potentiels de rejets de polluants, stock dormant et techniques de production zero waste sont à privilégier. CFP (empreinte carbone circulaire) est toujours inclus dans la méthode de calcul PEFCR. Ces données sont obligatoires dans la vérification PEF basés sur les données de EF. (Environmental footprint de la commission Européenne). Cela concerne les matériaux, les composants, les teintures et apprêts utilisés.
- Durabilité physique : Durabilité intrinsèque, ce critère s'intéresse à la prolongation de la durée de vie du produit. (robustesse et design éco conçu) Les sous-catégories sont segmentées pour garantir des tests aussi pertinents que possible.
- Des fonctionnalités déjà disponibles pour l'habillement ont été ajoutées pour les chaussures.
- Un protocole d'équivalence des tests a été introduit et le test de durabilité physique seul est une option facultative.
- Le coût du test d'un T-Shirt tissé non sportif est d'environ 180 €. - Réparabilité avec un indice de réparabilité : Les 5 critères de durabilité non physique: largeur de gamme, durée de commercialisation, type de matière, étapes de fabrication, la réparation sort du lot pour le consommateur final.
La disponibilité du réseau de réparation, des pièces de rechange, les campagnes, et leur budget, qui incitent à faire réparer plutôt que jeter seront inclus dans ce calcul d’impact.
- Les achats, le sourcing, la digital data, la distribution et la finance main dans la main
Tous les départements affectés doivent collaborer en amont pour maximiser la performance de collecte et d’analyse de données. D’autant plus qu’un focus global d’information est nécessaire pour l’affichage environnemental et donc au niveau produit. La gestion des invendus est inclue au niveau des produits individuels. Le calcul du statut du T Shirt est d’environ 20 % de taux d'invendu.
- Mise à échelle et collaboration
La mise en conformité des entreprises passe par la collaboration départements et la mobilisation transversale des services. La mise en commun des avancées intra secteurs comme le propose European Outdoor group, Outdoor sport valley, Eurosima avec son référentiel en collaboration avec Surfrider, Union sport et cycle… En Asie, Hong Kong Research Institute of Textiles and Apparel (HKRITA) contribuent à la récolte de données …
Ces bouleversements créent des complexités et des incohérences selon la taille de l’entreprise ou le secteur. On demande aux marques de se positionner sur un plan compatible avec l'accord de Paris car l’alignement est trop ambitieux. Pour certains, les tonnes de CO2 ne sont pas un indicateur absolu et égal selon l’industrie.
Pourtant les changements sont structurants et apportent les éléments de différenciation dont nous aurons besoin dans un futur proche. Les départements se parlent et sont en collaboration sur ces sujets, cela casse les silos et rend les entreprises plus résilientes. Cette transformation impose la réorganisation des investissements, une croissance de solutions sur la circularité …
Ces règles sont essentielles pour harmoniser les pratiques de mesure et favoriser la prise de décision éclairée en matière de durabilité. Il existe pourtant une nuance économique et juridique à prendre en compte dans les actions, en vue d’une amélioration concrète des enjeux sociaux, climat et biodiversité.
Dans la deuxième partie, nous examinerons de plus près les conditions de la directive sur le reporting en matière de développement durable des entreprises (CSRD).
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